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Mon histoire avec le papier mâché

Dernière mise à jour : 11 juil.

Il y a des trajectoires qui ne se dessinent pas en ligne droite.La mienne est faite de détours, de silences, de gestes répétés, de papiers froissés et recollés. J’ai traversé la vie ... Le papier mâché est mon médium, mais il est surtout mon langage. Voici mon histoire. Une manière de dire pourquoi je crée, avec quoi, et peut-être aussi pour qui.

Quand j’étais enfant, je voulais être fée

Je suis née le 9 novembre 1962 à Versailles. Mon accent, plus ou moins notable selon les circonstances, vient de la région toulousaine, où j’ai été élevée jusqu'à l'âge de 17 ans, âge auquel j'ai quitté le joug parental.

À la fois fille unique et sœur aînée, étouffée dans le corset familial des préjugés et du regard de l'autre, le rêve et la solitude chevillés au ventre sont devenus mes meilleurs compagnons, et au fil des années, ma carapace.

La création comme refuge

La créativité s'est révélée très tôt, me permettant d'échapper à un monde qui ne me correspondait pas. Rêver, imaginer, inventer, créer me laissaient entendre que rien n'est jamais acquis ni définitif, que j'ai le contrôle sur mon propre bonheur, qu'il est à portée de ma main, et que pour le construire, il me suffit de regarder autour de moi.

En quête rarement assouvie d'émotions fortes, intriguée par l'inconnu, attirée par la différence, j'ai eu l'occasion de vivre de longues périodes dans quelques pays étrangers avant de me poser en Normandie, dans le Calvados, depuis plusieurs années.

Une rencontre artistique décisive

Après un bac littéraire et plusieurs voyages, j'ai été formée à l'École Boulle pour le dessin, où les commentaires dévastateurs du professeur ont eu raison de mon intérêt pour le crayon : je n'ai plus jamais dessiné sourire.

C'est à Barcelone que j’ai découvert la technique du papier mâché, en suivant des cours d'Art Déco auprès d’un professeur colombien. Ce fut LA rencontre : humaine, émotionnelle, technique. Déterminante. Ce matériau est immédiatement devenu le prolongement de ma main.

Le papier mâché comme pansement

Depuis 1993, le papier mâché est le fil conducteur de chacune de mes créations.

C'est un sentiment très étrange que cette sensation d'accord parfait avec une matière, identique à celle que l'on peut ressentir avec un individu.

J’ai mis très (très) longtemps à comprendre ce qui me portait à recouvrir mes armatures pendant des heures, des jours, des semaines, de ces bandelettes plus ou moins rectangulaires, en répétant ce même geste, inlassablement, avec régularité et précision...

Le temps aidant, j’ai fini par admettre que ces morceaux de papiers caressés de colle pour s'assembler en formant des superpositions de couches ne sont rien d’autres qu’autant de pansements déposés sur une structure qui n’est elle-même rien d’autre que moi-même à chaque fois, tout en n’étant pourtant jamais la même.

Créer pour transformer

Ainsi, mes sculptures en papier mâché, tantôt gigantesques ou quasi fantasmagoriques, tantôt aussi fines par leur style que torturées par la matière, exploitent un art qui sublime les divers traumatismes et qui permet de renaître par le geste.

Celui-ci annihile un état ravageur pour construire un monde enchanteur, au travers d’un traitement du média utilisé qui se révèle très personnel. On me reconnaît pour mes patines, qui sont ma marque de fabrique, mais personne ne sait jamais quel sera le prochain projet : l’ensemble du travail reste éclectique.

Des pièces uniques, toujours inattendues

Les créations sont variées car chaque projet est unique. Réalisé dans l’intimité de l'atelier, je me mets systématiquement au défi de créer une pièce dont la personne qui la choisira pourra dire : « Cet objet a été fait pour moi » ou « Il m’attendait. »

Qu’il s’agisse d’une commande ou d’une pièce déjà réalisée, le challenge est mon moteur. Il me pousse en premier lieu à ne pas me répéter afin de ne pas lasser, pour toujours surprendre et séduire.

L’art de faire du beau avec du moche

L’exploitation de ce matériau me permet d'en intégrer d'autres, abandonnés ou voués au rebut. Mêler le papier au plastique, au métal, au bois, au polystyrène, à tant d'autres supports me permet de démontrer que tout peut s'unir, et que chacun de nous a la possibilité de créer son propre paradis avec ce qui est à portée de main.

Ce travail me réconcilie avec mon enfance : je répète encore et encore, inlassablement, le même geste (discours). Les matériaux (les êtres) peuvent s'unir dans leurs différences. Les réalisations révèlent le trop-plein intérieur, elles traduisent ce que mes mots ne savent ou ne peuvent exprimer.

Fragilité du papier, force du papier mâché

La feuille de papier, fragile, est à notre image : elle se renforce au fil des superpositions d'assemblages au point de sembler solide. Elle n'en reste pas moins fragile.

Mes finitions patinées, qui rappellent le métal, le bois, le cuir, expriment nos propres forces et faiblesses.

Ainsi mon travail correspond-il à une démarche dont le but, finalement, et quelle qu'en soit la lecture, tend à mettre en avant la fragilité, représentée par l'un de ces bouts de papier, et la force, révélée par l'ensemble de ces bouts de papiers réunis, qui habite chacun de nous.

S’ouvrir au monde

Le papier mâché m'ouvre grand la porte vers un imaginaire illimité, sans frontière ni tabou. À partir de rien ou de pas grand-chose, j'imagine, je construis, j'élabore et je voyage encore : pour partir à la découverte de l’inconnu ; pour m’enrichir d’expériences sans cesse renouvelées ; pour toujours tout remettre en question ; pour me dire que finalement l’essentiel n’est pas ce que je possède mais ce que je n’ai pas ...

Parcours et engagements

Si je travaille le papier mâché depuis 1993, mes premières expos n'ont eu lieu qu'à partir de 2005. Adepte de l'économie circulaire depuis toujours, bien avant qu'elle ne devienne l'un de nos enjeux prioritaires, j’ignorais totalement le concept et je pratiquais l'upcycling sans le savoir : depuis trois décennies, j'essaie de faire du beau avec du moche !

Depuis 2015, je suis membre de l’association Normandie Métiers d’Art. En 2017, j'ai rejoint CréalOuest, une plateforme collaborative dédiée aux métiers d'art. En 2018, j’ai intégré l’Académie des Arts de Lisieux.

Transmettre : une évidence tardive

Ces partenariats associatifs, tout comme les alliances individuelles régulières qui jalonnent mon parcours, m'ont aidée à grandir et à me développer, même s’il m’arrive encore très souvent de me sentir illégitime face à certains collègues que j’admire profondément.

C'est ce sentiment d'illégitimité qui m'empêche aujourd'hui encore de répondre aux demandes toujours croissantes de cours, de stages. Par éthique, par respect, par souci de bien faire, je m'accorde encore un peu de réflexion. Ca vient ...

Et toujours, cette envie d’être une fée…

Pour finir, aujourd’hui je suis grande… et j’ai toujours envie d’être une fée. Je pense qu’on ne se débarrasse jamais tout à fait de son enfance... ✨ Cette " biographie " n’est jamais figée. Elle évolue au fil du temps et, à l’image de mon chemin, se met régulièrement à jour dans la rubrique " A propos " de ce site. Véronique Chambeau

Sculpture en papier mâché - Véronique Chambeau
Sculpture en papier mâché - Véronique Chambeau

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